STJ.D'ASTRE.
ÉCRITS
FRAGMENTS (II)
CORRIGE
NON RÉVISÉ
st.J.D'ASTRE.
1980
VIDE
D'ERRANCE
Cahier
rouge et jaune à raies blanches
Samedi
6.1 1980
De
retour sur Paris depuis hier soir.
Une
rencontre dans le train ; cette femme que son Jules attendait à la
gare.
J'ai
emporté avec moi une radio, lègue des parents. (la radio du père).
Je
supporte de moins en moins l'odeur de pauvreté qui rôde dans ma
chambre.
Juste
avant mon départ pour Paris, je suis allé me balader sur le terrain
de jeux de mes dix ans, celui qui me servit plus tard de terrain de
rêveries et de méditations lorsque j'ai atteint l'âge seize ans.
Là je suis resté quelques instants en contemplation devant le
village qui ma vu naître ; j'étais surpris qu'il ait autant changé.
DIMANCHE
7.1.80.
Rendez-vous
demain pour film.
Prévoir
quelques photos de peinture pour la déco.
Me
documenter sur Gréco.
Passer
voir N… et B…
Pointer
chômage.
Envoyer
feuille ASSEDIC.
Écrire parents. (Carte)
Écrire proprio pour cloison.
Pour
DEA fournir plans pour le 14.
Approfondir
réflexion théâtrale
Peinture,
série de grandes toiles à mettre en chantier
Gravure
continuer la démarche.
Écriture ré-assemblage d'éléments épars.
Réflexion
sur les médias.
MERCREDI
9.1.80.
Suis
en train de travailler sur St Antoine de Padoue(maquette peinte).
Ai
vu ce soir E.. Elle est dans une passe difficile je crois. Elle se
pose des problèmes sur sa survie. Elle s'est donnée encore une
année, pour décider si elle avait raté sa vocation d'actrice.
Elle
fonce trop tête baissée. J'aimerais l'aider ; mais je ne vois pas
comment encore.
Le
travail intellectuel sur le DEA ne m'emballe pas ; mais je vais tout
de même l'engager.
Pour
les projets de grandes toiles ; je dois faire des études
préparatoires ; travailler dessus régulièrement.
SANS
DATE
Comprendre
l'espace primitif.
SANS
DATE
Je
suis repassé voit H.L.. le graveur dans son atelier rue Lepic; il ma
parut moins disponible que lors de notre dernière rencontre. Il ma
dit qu'il ne pouvait pas assurer tous les gens qui venaient
travailler chez lui. Comme c'est un créateur passionné par son
travail, il ne peut pas être à la disposition de tout le monde. Je
lui ai demandé de faire un dernier tirage ; celle des planches que
j'ai réalisées dans les Vosges. Je veux conserver le contact avec
lui ; son amitié me plaît.
J'ai
du mal d'entamer l'étude sur les origines des mythes.
Ma
situation matérielle me préoccupe légèrement. Combien de temps
puis je rester dans cette maison ? ; trois quatre ans ou moins ?
Je
dois consolider mes bases économiques dans les années qui viennent.
L'enseignement
expérimental me plairait. (au niveau du théâtre).
Je
pousse mes pions dans différentes directions, peinture théâtre,
écriture ; aucune de ces trois activités ne me procure de source de
revenu ; c'est assez déprimant.
SANS
DATE
Mon
obsession du temps est d'ordre économique ; je dois prendre d'autres
paris dans la création.
SANS
DATE
Le
printemps est avancé ; hier j'ai passé l'après - midi, comme
avant-hier à la bibliothèque. J'ai commencé par prendre des notes
sur le sacré sauvage de (Bastide). Ma méthode est anarchique.
Je
dois trouver une méthode de travail plus efficace.
Les
ouvriers sont sous ma fenêtre ; ils rénovent la façade ; ils sont
trés bruyant ; mais cela me change du silence habituel.
J’espère
pouvoir utiliser plus tard le travail de (Bastide), pour le moment je
vois mal encore comment le réinvestir.
SAMEDI
2 février 8O.
Suis
allé au concert de S... hier soir; j'y ai rencontré cette fille aux
longs cheveux qui tient la galerie ;elle ma proposée d'exposer dans
celle ci.
Je
vais prévoir cela.
J'ai
passé le restant de la nuit, à regarder des films dans ce cinéma à
République qui est ouvert toute la nuit.
Je
suis sorti de la salle à six heure du matin.
J'ai
remonté le boulevard sous une légère pluie ; il faisait encore
nuit.
J'étais
un peu surpris de découvrir Paris qui s'éveille.
Il
y avait des nuées de balayeurs habillés en vert ; pour la plupart
des immigrés ; les marchands de primeurs déballaient déjà leur
marchandise ; les noctambules rentraient chez eux ; des filles
maquillées comme dans les magazines se heurtaient du coude rue
Montmartre ; Rue St Denis les travestis couraient sur les trottoirs.
Je
me suis fais à manger en rentrant ; puis j'ai lu cent ans de
solitude.
Je
me suis réveillé à quinze heure ; je sentais le printemps dehors.
Je
me suis levé, j'ai joué avec la chatte.
J'ai
pris une collation, puis - je suis allé m'acheter des allumettes un
peu plus haut à Pigalle.
En
marchant sur les boulevards, j'étais étonné de voir les grandes
queues (de gens de couleur ) devant les cinoches ou l'on passe des
films de karaté, et des westerns spaghettis.
En
revenant de Pigalle rue des martyrs, j'ai aperçu de la lumière
chez E… je suis monté.
S…
( le nouvel amant de E…) était là, je lui trouve l'air pâle
et fragile.
E…
était là .
Je
suis toujours étonné du caractère extrême de mes répulsions et
de mes attirances vers elle ; c'est comme si une passion
inexplicable me liait toujours à elle. Une passion inassouvie
semblable à une drogue forte ou à un piment que j'avais été
habitué à prendre à une certaine époque d'une façon
régulière.
Dans
mon sang il y a toujours ce manque.
J'ai
pu observer chez E… à certains états de son visage, ce qui
l'anime intérieurement.
La
persistance de ma passion pour elle m'agace ; je voudrais bien mettre
en relief ce qui m'attache encore à elle pour tenter de m'en guérir
définitivement.
Je
n'ai pas renoncé entièrement au caractère de cette passion ; elle
me guette, comme l'ombre guette le soleil ; elle me guette comme une
image violente, comme toute image qui fait contraste.
Elle
m'attire, et plus elle m'attire plus je voudrais me défaire d'elle.
A
vrai dire au fond de moi-même je déplore le caractère malheureux
de cette étrange passion, trop excessive.
Je
projette sur E… des images qui ne correspondent plus à aucune
réalité.
J'aimerais
la voir soumise alors qu'elle est avant tout révoltée.
Je
voudrais exciser définitivement ma passion pour elle, car quand
elle me revient parfois par le revers comme aujourd'hui ; elle m'est
trop douloureuse.
Je
dois anéantir cette passion une fois pour toute.
LUNDI
4 FÉVRIER.
Dans
cette chambre ou je vis en repli ; j'ai comme le sentiment qu'en moi
des voies se sont fermées ; d'autres doivent s'ouvrir.
J'aspire
à une liberté totale ; à une liberté qui libère de toutes les
choses déjà apprises.
Je
poursuis une route mélancolique et sensuelle ou rien ne me heurte
assez.
SANS
DATE
Faire
un saut quelque part.
Voyager
en dehors de tout.
Me
reprendre après m'être perdu.
LE
7 FÉVRIER.80
J'ai
besoin de reprendre un train d'écriture qui soit un vrai train
d'écriture ; pas une vague posture comme celle que j'ai laissé
s'établir ici depuis quelques temps. L'écriture que j'ai laissé
survenir ici est trop complaisante.
La
lecture de l'homme sans qualité n'est peut-être pas étrangère à
ce revirement.
Le
désir d'écrire d'une façon plus intérieure non plus.
J'ai
dans la tête cette image, une maison dans le sud, un lieu pour
écrire d'une façon paisible qui revient me hanter.
JEUDI
20 MARS 80.
Neige
ce matin sur Paris.
Me
suis levé à midi.
Mes
réveils se font mal, j'oscille entre le noir et le gris.
J'ai
rencontré hier soir un jeune allemand à la sortie du métro, il
bruinait, il semblait me demander la direction de la porte d'Italie ;
comme il était une heure passé ? Je l'ai invité à dormir chez moi
;il aurait attendu un métro qui n'existait plus à cette heure. Il
est parti ce matin alors que je dormais encore. Il partait pour Saint-Trop. Drôle de trip !
P..
part pour la Bretagne cet après midi.
Je
déménage la deuxième partie de mes affaires ce soir, j'aménage
dans un nouvel appartement. Vive les voyages!
Je
plaisante ; mais quelque part je demeure insatisfait de mes espaces.
Quelque
part je me perds.
Une
image de ma vie résiste à ma conception du bonheur.
SANS
DATE
Je
ne peu créer que dans une liberté totale ; et au moment ou je
trouve cette liberté matérielle de créer, je me défends de m'y
abandonner.
Je
suis un beau crétin.
PARIS
1er
(4 ème étage gauche)
RUE
SAUVAL
Le
25MARS 1980.
Mardi
soir.
J'ai
presque terminé d'aménager dans mon nouvel appartement. Une très
grande pièce blanche avec une salle d'eau et une cuisine ; deux
fenêtres et beaucoup de lumière ; l'appartement est situé au cœur
de Paris. C'est la première fois que je dispose d'un lieu si grand.
Les
locataires de l'immeuble sont soit des travailleurs étrangers ; soit
des personnes à la retraite ; des gens terre à terre.
Je
dois rendre les clés de l'ancien appartement (de la rue Rochechouart
) demain.
Un
pan nouveau de ma vie est en train de s'ouvrir.
Je
suis seul, j'ai la nostalgie des femmes.
Je
compte remonter dans les Vosges pour dix jours aux environ du 5.
J'ai
gardé la chatte avec moi, (c'est l'arrangement que j'ai fais avec
E… ) J'ai parfois l'impression qu'elle s'ennuie ; mais c'est
une impression, je parle de la chatte naturellement, pas de E.. E…
ne s'ennuie pas, elle est avec S…un aventurier fils de bonne
famille.
M…
est venu me voir hier; il était dans tous ses états; le lieu qu'il
occupe le rend fou ma t'il dit; il cherche à en partir; me voir ici
doit accentuer son désir de partir de son havre sous les toits qui
lui
est
devenu insupportable.
MERCREDI
J'ai
placé mon bleuet au centre de la pièce vide et blanche ; de l'eau
bout à l'intérieur d'une casserole.
L'eau
je l'ai fais bouillir à cause qu'ici l'air est trop sec ; à cause
du chauffage électrique que j'y ai installé.
Le
camping gaz au centre de la pièce produit sur moi une étrange
sensation ; j'ai l'impression de bivouaquer, j'ai l'impression d'être
en voyage.
J'ai
l'impression d'être ailleurs.
J'aime
cette sensation obscurément.
Le
décor ici est assez frustre comparé à d'autres lieux que j'ai pu
occuper.
L'espace
ici semble en attente de quelque chose d'indiscernable ; c'est
peut-être la nudité des murs qui joue ce rôle.
Je
dois le dire ; je suis en attente d'une vie à venir.
L'espace
nu des murs (lui aussi ) semble attendre.
Il
attend probablement (que le jour vertical se lève).
C'est
pourquoi ma pensée aussi est dans l'attente.
C'est
pourquoi ce lieu aussi est dans l'attente.
Nous
attendons tous que le jour vertical se lève.
Et
qu'il nous fasse nous lever.
Tous.
Hors
de nous.
Ce
miroir peut-être est inutile je n'aurais pas du l'amener.
Ces
deux panneaux posés contre le mur à quoi vont 'ils vraiment servir
?
Cette
chambre est nue comme paraît l'être une femme frivole.
Sait-elle
?
Lui
a t’ont dit déjà ?
Qu'
- elle va servir d’entremetteuse au petit peintre ?
Sait-elle
?
Qu'elle
va servir de lieu de méditation et de supplice pour celui qui
réclame ici même à corps et à cri le vil statut d'écrivain et de
bonimenteur ?
Sa
nudité de femme promise annonce t’elle des plaisirs (salaces ou
sucrés) ?
Des
plaintes (subtiles au détour) ?
Des
joies (qui seront toutes subites et éphémères) ?
Des
souffrances (probables et presque inutiles) ?
Ou
bien n'est elle faite que de rumeurs ?
Annonce
t’elle des jours nouveaux cette douce femme solitaire allongée
sur ma couche ?
Ma
tête gît sur ses genoux.
Ma
tête est lourde.
Le
décor est léger.
Le
décor est frivole.
Ma
tête est lourde elle me tombe.
SANS
DATE
M'exercer
à petites doses à travailler, car j'ai reculé depuis longtemps le
principe d'une activité.
Cette
fuite dans les désirs et les angoisses du repli ; cet abandon à des
errances à ses revers.
Je
vais chercher à me déployer.
UNE
PAGE DE COMPTES.
JEUDI
27
J'ai
peut-être le cœur trop sec, cela se sent à certains endroits ;
certains moments de dépression proviennent de là.
Je
ne caresse plus que des rêves.
Je
frôle du dur et du rêche.
Ce
journal ne montre
Ce
journal ne sert
Qu'à
refléter des moments d'absence ?
Je
n'ai rien à dire dans ce journal, rien à convier.
M...
ma dit que j'étais cynique.
Cela
ma fait mal, je ne croyais pas l'être.
Je
me durci , par peur d'aimer trop.
Je
ne sais pas bien danser.
Il
me manque. Toujours un manque.
SANS
DATE
C'est
une sorte d'étranger qui écrit ces lignes.
Pour
écrire comme lui il faut quelque part accepter comme lui, l'ablation
de son moi de sa réalité de son corps ; car parfois il lui arrive
d'être inaccessible à lui-même.
Une
écriture sensible devrait couler le long de ces pages, et y fonder
des ruisseaux ; des lignes miroitantes et faire éclore des bulles de
lumière sur ces pages ; mais on peu rarement prévoir une telle
écriture.
Celle
que je traverse, je ne l'aime pas ; non je ne l'aime pas réellement.
Elle me rappelle un peu dans sa façon de se dire ; ces papiers
collés (légèrement froissés)de Perros. , quelque chose qui frise
à tout moment la tragédie, cela ne me plaît pas .Cela ne me plaît
pas de n'être qu'un simple papier qu'on froisse.
C'est
que je dois trouver d'autres sujets de préoccupation que moi.
Mon
intérieur devient sec à force d'être rabâcher.
J'ai
trop dit comme cela.
Inutile
de recommencer.
SANS
DATE
Lecture
d'une biographie de Klaus Volker sur Brecht.
L'itinéraire
de Brecht me rappelle à des valeurs perdues.
Brecht
peut m'aider néanmoins, car il me ravit à cet état de ravissement
surfait ou s'ennuie ma nature.
Le
sens critique m'est nécessaire, il est chez moi comme une partie
essentielle de ma nature.
Je
dois sortir des armes plus brillantes de mes placards.
SANS
DATE
Musique
religieuse, cantique à la radio. Soleil.
Je
fume une blonde.
J'ai
passé une partie de la matinée et de l'après - midi à piétiner
sur cette étude qui est une contrainte de travail que j'exerce sur
ma sensibilité.
Je
procède uniquement par petites touches, découvrant de temps en
temps un vague intérêt dans ce jeu désolant ou tombe mon écriture.
Je
me reproche de manquer de résolution(le mot sonne faux)de manquer de
tempérament (le mot sonne plus juste), face à cette somme de
travail qu'il faut livrer pour arriver à produire un résultat un
minimum satisfaisant. En réalité je suis assez mal armé, pour
affronter ce genre d'épreuve ; je me suis répété cela souvent ;
je manque de discipline et de formation. Tout travail d'ailleurs qui
n'est pas un tant soit peu empreint de plaisir me rend grincheux.
Elève médiocre, je ne dois surtout pas chercher à rivaliser avec
les penseurs, ils me sont étrangers. Je suis encore et toujours
l'autodidacte mal dégrossi.
DIMANCHE
30.
Mal
aux dents, c'est paradoxal, car elles sont arrachées. Je prends
Glifanan sur Glifanan pour calmer la douleur.
J'ai
décidé de partir dans les Vosges pour une semaine. Je vais prendre
le train de 6H45 mardi matin. J'ai encore une séance chez le
dentiste demain à 15H3O.Plutôt ce sera fini, meilleur ce sera. Je
me serai fais arracher sept dents dans la semaine.
J'ai
étalé du linge dans ma pièce, elle a prit des airs de buanderie.
Mon
ami M... doit passer en mon absence pour donner à manger à la
chatte.
Ma
voisine est venue ce matin me montrer une photo de ses enfants et
petits enfants ; c'est une dame d'un certain âge, plus de la
soixantaine ; elle porte de grosses lunettes, elle aime beaucoup
parler ; elle a pris une photo de la chatte, et ma fait visiter son
appartement qui n'est pas si mal ; il me fait penser, à
l'intérieur de ces vieilles fermes montagnardes à cause sans doute
de la disposition des lieux ; de l'aspect des murs blanchis et de
l'atmosphère rustique qui s'en dégage.
Je
lis actuellement plusieurs livres à la fois. Une biographie de
Brecht, un livre d'Artaud - Messages Révolutionnaires - un livre sur
la violence et le sacré ; le nouveau désordre amoureux ; une autre
pile de livre m'attend. Un saint Ignace de Loyola, et une étude sur
Einstein font partie de mes lectures intermittentes.
Hier
soir je suis allé au vernissage (rue de la Villette) un peintre
américain exposait ses toiles. Ses toiles sont volontairement
agressives ; des jeunes hommes aux gros sexes apparents s'offrent en
spectacle dans un décor aux teintes grises et passés ; tout cela me
fait penser au groupe Bazooka et à Andy Warhol. Il y a là de
l’intérêt, et un côté spectaculaire qui n'est pas sans
m'attirer, à cause peut-être de la provocation suscitée par les
toiles.
Je
compte me mettre à l'ouvrage moi-même ; j'ai récupéré un grand
châssis de bois recouvert de carton, de 1,50X2m.
J'ai
des projets qui sommeillent ; sortes de clair-obscur obscènes
(scènes contemporaines)traitées de la façon classique, avec
toutefois l'idée d'une défiguration de la couleur et des formes,
qui doit se préciser.
Si
mon étude sur Artaud -Brecht me laisse le temps, je commencerai à
me mettre à l'ouvrage en rentrant des Vosges.
Ce
soir je suis invité, à pendre la crémaillère chez M…….
LE
2.4.8O
J'ai
réintégré le paysage de toujours, celui de mon enfance ; je
n'éprouve aucune joie particulière à me promener dans les rues de
mon village, principalement lorsqu'il pleut. Je vois peu de gens ici
; ceux que je vois me semblent trop semblables à ceux que j'ai
toujours connus. La tâche même que j’accomplis à travers cette
étude théâtrale me semble absurde ; et en tout cas déplacée.
(j'ai
plutôt besoin de donner à
la scène
du sang et des pleurs.)
Chercher
à méthodiser le chaos à travers une étude universitaire plutôt
que se livrer à ses penchants véritables est une absurdité.
Je
suis en tout point aujourd'hui objet d'errance.
SANS
DATE
Ce
que je lis de Brecht m'irrite au plus haut point ; car je découvre
chez lui la marque d'une intelligence sociale que je ne possède pas
; et que j'ai rêvé quelque part de posséder; Brecht était en
outre un merveilleux joueur de poker, il savait placer ses coups là
où il fallait, et quand il fallait ; était-il vraiment aussi
cynique qu'on le dit dans ses rapports avec les femmes ?
Quelque
chose me déplaît foncièrement dans ma façon de conduire ma vie ;
je dois l'avouer, je suis affligé quelque part d'une dose formidable
de naïveté ; je crois les événements les plus courants soumis à
une sorte de destinée magique ; contre laquelle je n'ai pas de
prise. Ce qui m'ennuie dans ce constat ; c'est la perte de mon sens
critique, assez rigoureux il n'y a pas si longtemps et qui a disparu
sous l'effet d'une sorte d'abandon total et irréfléchi aux
circonstances.
Je
manque d'agressivité, et cela en un sens m'est fatal.
JEUDI
10.4.80
Je
suis de retour à Paris depuis hier soir. Seule la chatte semblait
m'attendre.
SAMEDI
12.
Soleil,
me lève vers 13H.
J'ai
fais la java hier soir, je suis sorti en boite avec M……
L…….
est passé vers 1OH légèrement abattu, il m'emmerde un peu avec sa
complaisance à s'abandonner à ses flippes. Il a souvent besoin
d'être remis en place. Toujours ses mêmes obsessions sur la
création, bref il est parfois insupportable.
Quand
je regarde ma façon de vivre, elle me semble parfois trés
paradoxale, un peu étrange, parfois désabusée ou outrée ; je vis
quelque part en dehors du temps. Cette impression n'est pas nouvelle.
Elle resurgit fréquemment.
Je
suis en manque d'amour, je le savais depuis un certain temps, mais
cela se confirme de plus en plus ; pourtant rien ne surgit à
l'horizon depuis ma rupture avec E……
J'ai
aussi envie de baiser, mais c'est une autre histoire.
Je
suis comme un poisson dans un bocal de luxe qui dispose de tout son
temps et de tous ses esprits, et qui demeure pourtant instable,
infréquentable quelque part.
DIMANCHE
SOIR IL DIT :
J'aimerais
tuer la tendance au confort qui m'habite.
Mais
que fait-il ?
Il
devise tranquillement la pipe à la bouche devant sa fenêtre.
Cette
peau, cette protection qui l'entoure, il l'aime sans doute plus qu'il
n'y paraît.
SANS
DATE
LE
BROUILLON D'UN RECIT
LE
VOYAGEUR PERDU
Il
était arrivé à son but. Son but était cette gare désertée. Il
la contemplait désabusé.
Cette
gare désertée était remplie d'une foule silencieuse invisible,
il se sentait lasse, il se demandait en définitive quel avait été
le but de son voyage.
Il
lui semblait qu'il avait perdu le sens de l'orientation sinon
pourquoi aurait - il échoué ici. ? C'est à peine s'il se souvenait
:
Il
s'était il y a peu de temps contenté de suivre un train ; ce
train avait pris un peu de retard, ce n'était pas sa faute, il
traînait en chemin. Ce train devait le conduire quelque part ; il
ne savait trop où à présent ; sans doute dans une ville
imaginaire car il aimait beaucoup les villes.
Lorsqu'il
s'était réveillé le matin, il avait aperçut à travers les
vitres du train une ville étrange parfaitement anonyme, une ville
ou les monuments et les gens se confondaient dans son imagination
avec des images immobiles. Cette ville imaginaire était pourtant
bien réelle (dans son esprit il ne savait plus ou se tenait le vrai
du faux) il se disait que cette ville était celle qu'on avait
choisit pour lui, pour qu'il y fasse son nid ; il ne vit pas tout de
suite, qu'elle était enfouie sous un tas exceptionnel de choses
inutiles et stériles.
Ces
choses inutiles et stériles pouvaient la rendre attrayantes les
premiers temps pour les hommes qui la visitaient en quête de
trouvailles originales ; mais passé ce mouvement, il apparaissait
trés vite à ces hommes que ces trouvailles ne valaient pas grand
chose. Lui pourtant était persuadé du contraire; c'était pourquoi
il était resté si longtemps dans cette ville.
Le
plus difficile ensuite avait consister à s'échapper de cette
ville mirage, de ce lieu si banal ou il avait (il venait de s'en
apercevoir après coup) passé plusieurs années de sa vie ; il
venait juste de réaliser qu'il faisait partie de ces hommes qui
s'étaient trompés sur les pouvoirs de cette ville. Cette ville
l'avait trompé, elle n'était pas si admirable. Il avait décidé
d'en partir.
___________________________
Il
était parti de cette ville, mais elle le retenait encore en otage.
Il était prisonnier d'elle ou plutôt son imagination l'avait rendu
prisonnier d'elle. Il lui avait trop consentit sans s'en apercevoir.
Cette ville l'avait enchaîné, elle était devenue pour lui une
ville mythique. Et bien qu'il fut seul dans cette gare désertée,
son imagination parcourait encore les ruelles irréelles fantasmé
de celle cité mythique ; il était toujours prisonnier de cette
ville.
Pour
s'extraire de celle ci (en esprit) il s'était fixé un but, il
s'était donné d'écrire sur celle ci un mémoire ; Il pensait que
c'était seulement après qu'il ait écrit ce mémoire qu'il
pourrait en partir. Il s'imaginait qu'il serait libre de ses
mouvements seulement après qu'il ait écrit ce mémoire ; car il
s'était mis dans la tête qu'il devait se procurer un passeport pour
franchir la frontière qui séparait cette ville imaginaire du monde
réel. C'est pourquoi, il s'était mis à écrire. Il pensait qu'en
écrivant il retrouverait contact avec le monde réel. Il écrivait
sur une petite table de mica, derrière la vitre épaisse et
transparente du train. Il écrivait, il écrivait, cela faisait des
jours entiers qu'il écrivait.
C'était
peut-être peine perdue... c'était peut-être peine perdue ; car
déjà il ne savait plus ou il était.
Il
était sans doute arrivé, à son but.
Le
but de son voyage était cette gare déserte.
SANS
DATE
Difficulté
à travailler, tous mes travaux avancent avec lenteur.
J'ai
un problème de concentration.
J'aimerais
réamorcer une production en peinture ; mais c'est lent à démarrer.
Une
sorte de glissement s'est opéré dans mes états intérieurs.
Je
dois passer un cran au-dessus.
LUNDI
Paris.
Soleil
bruit de ville.
Je
prends des notes à la dérobée.
Mal
d'espace.
Je
pense à E…… qui est partie pour BALI.
Il
me semble que je perds mon temps ici.
Hier
j'ai revu S… il ma déçu, il est mangé par la froideur, il est
mangé par son travail; il se raccroche à son travail sans plus (S…
est un fabuleux danseur qui ne danse plus; quelque part il est comme
mort ).
Beaubourg
hier soir, j'ai aperçu le visage d'une fille qui resplendissait,
elle chantait seule dans la pénombre.
En
rentrant, j'ai arraché violemment le collier qui pendait à mon cou
depuis plusieurs années, geste incompréhensible ; j'avais envie de
dévorer tout l'espace.
Jeu
stupide d'un jeune chien qui s'ennuie ou prémisse d'une guerre
intérieure ?
SANS
DATE
Je
viens de lire quelques articles sur la mort de Sartre.
J'éprouvais
beaucoup d'affection pour lui , même s'il était aussi loin que
possible de mon univers. Quelque chose va manquer à notre époque ;
car une partie de sa conscience rebelle vient de mourir.
SANS
DATE
ÉCRIRE.
Aujourd'hui,
ma situation matérielle est bonne, mais c'est ma situation psychique
qui est douloureuse.
Une
sorte d'abandon caractérise mes états présents.
Je
me violente trop fréquemment.
Sartre
dit qu'écrire ne change rien au monde ; mais qu'une planche de
salut peut s'offrir à celui qui écrit ; ne serais ce qu'en ceci "
L'écriture le vide de ses abcès ".
Voici
ce que je réponds :
Rien
de ce que j'écris ne me satisfait. Rien de ce que j'écris ne me
représente en totalité.
Je
suis vierge d'écriture.
J'ai
cherché éternellement à tirer satisfaction de mes écrits sans
jamais y parvenir ; c'est que ma jouissance dans l'écriture n’a
jamais pu s'affirmer réellement ; c'est à dire qu'elle n'a jamais
pu s'affranchir de l'idée que je m'étais faite un jour de
l'écriture ; une idée presque mythique, inactuelle, intemporelle.
Je
n'ai pas fais un cheminement dans la conscience par l'écriture
comme Sartre la fait. L'écriture m'est venue comme un objet
paradoxal, que j'utilise pour m'éblouir, pour me mystifier et pour
m'assujettir ; car je suis aveugle à moi-même. L'écriture rajoute
à mon trouble plus qu'elle ne m'apaise. Pourtant c'est vrai écrire
apaise temporairement mon mal d'être, sinon, je n'écrirais pas
d'une façon aussi régulière.
D'ailleurs
parler d'écriture dans mon cas est une affirmation osée.
Je
n'écris pas, je N'écris.( négation d'écrire).
SANS
DATE
Je
suis physiquement mal dans ma peau, je ne trouve pas de stabilité
dans mon espace.
J'aurais
besoin d'un exutoire.
L'écriture
pourrait être cet exutoire ; je m'efforce parfois quelle le soit ;
mais je n'y parviens pas.
J'ai
la sensation cruelle de me répéter à chaque page que j'écris.
Tout
ce que j'entreprends au niveau de l'écriture se brise.
Ne
subsiste que ces vulgaires notes qui me servent d'exutoire.
Je
suis penché sur l'écriture d'un roman qui ne parvient pas à
s'écrire, car il est trop proche de ma vie.
Ainsi,
il ne s'écrit pas.
Ce
roman s'appelle NUIT AUX PÔLES ; voilà la définition que j'en
donnais il y a quelques temps :
"
Ce
roman est déduit du rapport incessant que j'établis à l'écriture.
L'écriture serait le centre pulsionnel et attractif du roman ; ce
roman n'en serait pas vraiment un au sens traditionnel, car il
ressemblerait plus à un corps d'écriture qu'à un roman. Ce serait
un corps de révolte, de jouissances et de passion. L'objet du roman
serait l'écriture elle-même."
J'ai
plusieurs fois tenté d'écrire ce roman, sans jamais y arriver.
SANS
DATE
L'ECRITURE
Redeviendra
pour moi, ce qu'elle aurait toujours du demeurer, une compagne
privilégié ; le jour ou la pénétrant comme un homme pénètre
un femme, j'en ferai une maîtresse résolue à m'aimer.
Ce
jour là ; devenant pour moi une véritable compagne d'amour, elle
reconstituera le véritable centre de ma mémoire celui qui passe
par mes profonds désirs pour elle. Ce jour là, je serai libre
d'être moi-même et de l'aimer sans réserve.
SAMEDI
17 MAI 80
Mal
de gorge, j'ai du choper la crève les jours derniers, en me baladant
chemise ouverte par plein vent.
J'ai
rencontré A.. à Beaubourg cet après midi, agréable surprise; il a
beaucoup changé dans l'aspect physique, mais aussi à l'intérieur
de lui. Nous sommes allé prendre un pot ; il ma parlé de son voyage
en Asie et en Inde. Il ma mit l'eau à la bouche avec ses aventures,
il respire l'odeur des voyages ; il m'a donné envie de voyager.
Je
suis enfermé depuis trop longtemps dans cette ville (Paris.)Je dois
en sortir quelques années ; le mieux serait d'accélérer l'étude,
et de voyager une ou deux années d'affilé. Revenir vers trente
trois trente six ans, ce sera bien assez tôt pour ce que j'ai à
faire.
26
MAI 8O.
UNE RÉVÉLATION :
Mon
imaginaire personnel dévoile de plus en plus le mystère naturel des
signes occultes qui sont présents dans la réalité, mais que nos
yeux ne peuvent voir à l'ordinaire. Disons pour dire simplement
qu'il existe un autre état de conscience qui interprète
différemment la réalité. J'en ai fais l'expérience hier .
J'ai
assisté dans un état second à des Danses sacrées au Châtelet ;
c'était des danses pratiquées dans les temples en Inde, elles
datent au moins du VI ème siècle de notre ère. Il est vrai que
j'avais fumé une herbe, dont j'ignore la provenance ; j'étais avec
mon ami J… le poète vénézuélien.
Les
figures que les danseuses dessinaient dans l'espace me parlèrent
d'une façon si intense que j'en fût immédiatement bouleversé ; en
réalité (j'avais l'étrange la sensation qu'elles ne s'adressaient
qu'à moi seul ) . Je sais reconnaître l'absurdité d'une telle
affirmation puisqu'il y avait au moins trois cent personnes dans
l'hémicycle du théâtre ; mais en regard de la normalité certaines
affirmation paraîtront toujours bancales.
Je
me dois d'être clair, si toutefois aujourd'hui j'y arrive. Ces
figures me parlaient d'une façon réellement exceptionnelle. Elle me
parlait de moi, du moi qui est en moi et de celui qui le double (pour
dire comme Artaud ) Ce moi était lui même et un autre. Il était à
la fois humain et supérieurement humain, c'est à dire divin. Mais
ceci n'est pas encore suffisant pour rendre compte de ce qui s'est
produit à ce moment là entre moi et les danseurs sur la scène ; je
voyais ceux ci comme une succession divine d'intelligences, qui
tentaient de m'expliquer car je les interrogeais les principes de
fonctionnement de l'univers, et ils me les expliquaient. Ils
m'expliquaient la constitution réelle du monde, et ils me montraient
la forme de l'intelligence sacrée qui se meut derrière tout ça.
Les danseurs et les danseuses sur la scène possédaient la
connaissance, ils m'expliquaient directement ce que j'avais toujours
cherché à comprendre, sur l'origine mystérieuse de la vie. Cette
vision que j'ai eue, je suis incapable de la reconstituer dans son
intégralité ; j'ai l'impression à présent qu'elle m'échappe, car
les mots sont impuissants à la traduire. C'était comme si ma vision
du monde s'était élargie d'un seul coup ; et puis s'était refermée
peu après.
SANS
DATE
J’ai
besoin d'un grand dépaysement. Je me suis fixé le 30 pour aller en
Bretagne; la Bretagne n'est peut-être pas ce dépaysement brutal
dont j'aurais besoin, mais je n'en vois pas d'autres à portée de ma
main. Si j'étais assez fou, je partirais au hasard en pointant mon
doigt sur la carte de l'Asie ; mais je ne suis pas assez fou pour
cela ; mes voyages à moi sont toujours ou presque imaginaires.
Dans
une interview Godard dit qu'à force de vivre trop longtemps seul, on
finit par devenir fou. Je suis presque à même d'en fournir la
démonstration surtout après l'expérience que j'ai vécue récemment
au châtelet.
SANS
DATE
RENCONTRE
D'UNE FEMME IMAGINAIRE
Je
suis l'ange et le démon, le fou qui suit la courbe des astres
Le
ciel s'est couvert d'un voile de suie opalescent
Le
ciel et les étoiles se logent dans mes narines
Les
poètes que j'admire récitent des vers en direction des dieux
Des
déesses modernes ont planté leur rouge à lèvre dans les bassins
du Trocadéro
Dans
un rêve, j'ai vu une femme aux cheveux roses qui sirotait une
grenadine sur une place perdue
Quelque
part dans Paris
Elle
avait la peau jaune comme les blés
Je
n'étais pas trés sur d'être à la hauteur lorsque je l'ai vu se
pencher sur moi pour m'embrasser
Je
l'ai fait basculer pourtant d'un seul coup de rein dans ma nuit
solitaire
Elle
est toujours accroché à mes basques depuis.
BRETAGNE
ETE 80
Je
marche dans un désert idéal, je suis assiégé par les rêves.
Je
suis parti de Paris car mon âme commençait par y brûler.
J'ai
du mal de trouver ma place ici en Bretagne.
Je
suis chez mon ami D.. et chez K..........sa nouvelle femme (jeune),
notre relation est en perpétuel déséquilibre.
J'ai
amené la chatte, elle a failli m'échapper à la sortie du train ;
elle était devenue comme folle.
J'habite
dans leur petite maison qui est charmante.
Nous
allons travailler pour un Festival.
Le
stage avec le Bread-and Puppet est compromis.
Je
dois sortir de mes pompes.
SANS
DATE
Largeur
des estuaires
Longueurs
des plages
Corps
dorés
Cœurs
ruinés
Pâmes
Vertiges
Surtout
vertiges, car nous sommes sous les pluies
En
bordure des falaises
A
nos pieds rampe la mer de nos fortunes
DIMANCHE
13
Temps
pluvieux sur la Bretagne comme à l'accoutumé.
Nous
sommes allé assister aux mystères de Morlaix hier-soir, grande
fête locale ; c'était une sorte de mystère parodique qui
regroupait au moins deux cent participants. La pièce était pas mal
conçue. C'est quasiment un mystère imaginaire. L'idée est très
bonne.
Je
rêve trop.
Je
découvre peu à peu la Bretagne. Une vie culturelle intense,
beaucoup d'exilés parisiens, chômeurs ex-baroudeurs qui se sont
retirés dans ce pays couvert de pluies. Notre trip d'animation sur
le festival de la R... J... prend forme. Pour le moment je réémerge,
je prends mon pieds dans les couleurs ; nous avons monté un atelier
peinture ; des colos doivent venir dés la semaine prochaine pour
l'investir.
AU
PROGRAMME DU FESTIVAL
FÊTE
DE L'EAU
DIMANCHE
29 JUIN un temps fort du festival.
D..
me parle d'un jeune poète qui s'appelle Yvan .Le Men rencontré
récemment.
Xavier
Grall le Hérault des poètes alternatifs breton a dit de lui -
il a le verbe plein la gueule et le théâtre dans la peau, à lui
seul il est comme une émeute au bords de mer."
Il
n'y a qu'en Bretagne qu'on puisse faire une telle publicité pour
les jeunes poètes !
EN
JUILLET
De
la musique médiévale
Danse
classique
Musique
contemporaine percussions (Christopher TREE)La partie la plus
intéressante.
C.Tree
est un américain qui improvise des musiques étranges à travers
une centaines d'instruments à percussion, des tubes de laiton, des
cloches de cuivre (représentant la silhouette du bouddha ) des
clochettes indiennes, des cymbales de chine, des cloches birmanes.
EN
AOÛT
Alberto
ponce guitare classique
Poésie
avec Queneau (
je l'ai raté!)
Free
- jazz ( Portal )
BREAD
AND PUPPET
En
réalité la venue du Bread est compromise.
LUNDI.
JUILLET
Je
suis toujours à Plouha chez D… et K…
J'ai
retrouvé un certain équilibre mental.
Hier
soir nous avons passé la soirée avec des amis dans une petite
maison ; la fréquentation de gens très divers me fait du bien. Je
retrouve des références " sensitives", après ma cure
d'ultra solitude mystique à Paris.
Actuellement
je suis rentré dans une phase picturale. J'ai eu beaucoup envie de
peindre les temps derniers, mais j'en ai eu très peu la possibilité.
Cela me confirme dans la nécessité pour moi de ne pas me
cloisonner, purement théâtre, purement écriture, purement
peinture. Je traverse des phases impossibles à programmer
d'ailleurs. Pour le moment, je dois laisser se développer au maximum
cette phase pictural.
J'aimerais
peindre un grand tableau intitulé" le déjeuner sur l'herbe"
en rappel aux impressionnistes, c'est les couleurs devant la maison
de D.. qui m'y incitent, et une certaine cambrure ;une cambrure
violente du paysage.
J'ai
peins une vue de la chambre ou je suis, (quand j'y suis).
CARNET
DE PEINTURE ÉTÉ 8O
EXTRAITS
DU CARNET PEINTURE ÉTÉ 8O. (Juillet)
(Carnet
vert à spirales.)
NOTES
ET DESSINS :
Première
page.
Une
page de symboles colorés.
Seconde
page.
Ici
rien qu'une multitude de signes (graphiques) et de couleur.
Des
lettres.
Tout
cela n'est pas sans me rappeler le travail plus systématique
toutefois de F.. dans ce domaine.
S'agit-il
de trouver un nouveau code ? ( un code pictural universel) ou
d'exprimer spontanément par une série d'associations inconscientes
des états émotifs à partir d'un code prémédité.
Ou
bien nous trouvons-nous simplement en présence d'un "nouveau
code primitif aléatoire" né des associations poétiques,
résultant de l'interaction de signes d'objets et de couleurs posés
arbitrairement sur la page. Tout ça est encore assez confus, mais
indique malgré tout un ordre de préoccupations, qui sont tout
simplement celles qui me tournent dans la tête à présent et qui
concernent l'emploi simultané, des lettres des chiffres, des
symboles, et des couleurs associés en vue de produire un petit livre
par exemple.
UN
PETIT LIVRE QUI S'INTITULERAIT.
PORT POÈME
ET POÈME TRACTEUR
et
qui se composerait comme suit.
D'un
poème un peu, mais pas trop ringard
Le
poème qui suit :
A
toi l'insolente maîtresse de mes rêves insoumis,
Je
soumets ce poème TRACTEUR
Pour
que tu puisses
A
l'envie
Venir
étreindre
Mon
cœur pionnier
Mon
cœur paysan
Mon
cœur cultivateur
Tel
des mottes de rêves
J’écrème
mes poèmes
MOT
A MOT
En
terre je sème
Des
poèmes
Je
survole les sillons
Comme
si c'était des vagues
Les
océans éternels
de
la création
Je
les tourne et retourne
A
la pointe de ma houe
Je
fertilise les étendues de la PURE POESIE PLASTIQUE
Sur
mon POÈME TRACTEUR
A
est ROUGE
O
est NOIR
I
est VERT
U
est JAUNE
et
toutes les lettres de l'alphabet ont une couleur
Rien
de nouveau
Je
sème
Des
RIMES
Sur
mon POÈME TRACTEUR
De
mon port imaginaire
Je
vois se dresser
L'océan
Impétueux
Je
vois scintiller
les
vagues que fait
La
poésie moderne
Quand
elle est prise d'assaut
Par
mon tracteur
Ce
n'est rien
Rien
de bien extraordinaire
Ne
vous effrayer pas citoyens, citoyennes !
C'est
moi qui sème
Je
sème
Tel
que
Cendras
Apollinaire
Rimbaud
Et
Maillaikoski
Me
l'enseignèrent
Je
sème dru
Je
sème ferme
Je
sème
Les
toutes petites graines DE LA POÉSIE MODERNE !
ST.J.D'ASTRE
août 80.
Et
d'une composition plastique musicale avec lignes cercles carrés et
triangles de couleur rouge jaune vert bleu noir et orange sur fond
blanc. Les lettres du poème étant elles même colorées. Cette
composition formerait un petit livre qui lorsqu'il est déplié,
formerait une fresque de dimension réduite.
Comme
suit :
DISPOSITIF
TYPOGRAPHIQUE :
______________________________________________________________________________________________
PORT-POÊME
ET
POÊME
TRACTEUR Collages
dessins
signes
lettres sous forme
d'un dépliant
avec des ronds des
Carrés et des triangles
de culeur
______________________________________________________________________________________________
DISPOSITIF
de couleurs de formes et de lignes :
SUITE
Juillet.
Bretagne.
AUTRES
ESQUISSES POUR M'AMUSER
Un
dessin au feutre et au crayon de couleur.
(Avec
une note écrite sur une page blanche juste en face.)
"Isoler
des figures pour arriver à une signification qui parle à la vue et
aux sens."
______________________________________________________________________________________________
UN
AUTRE DESSIN. (toujours au crayon de couleur et au feutre)
Avec
une note sur une page blanche juste en face.
"Ce
qui me paraît intéressant, c'est de savoir à partir de quand la
matière peut provoquer un état correspondant à une sensation
précise."
___________________________________________________________________________________
Sur
une page isolée
POURQUOI
RECHERCHER TOUJOURS UN SENS ?
Est
ce l'objet du travail ?
Il
s'agit ici simplement d'une ébauche de travail sur la matière, et
sur les sensations quelle est à même de provoquer.
Notes:
SIGNES:
Quelque
part, il faudrait pouvoir décomposer d'une façon systématique les
signes, les couleurs, les formes ; utiliser toutes les combinaisons
possibles en variation.
Pour
que les signes ainsi mis à jour parlent à toute sorte de public, et
non pas seulement à un public d'initiés, que faudrait-il ?
S'agit-il
seulement de créer un nouveau code ?
Ou
de suggérer des états émotifs
Il
s'agit de recréer par transposition, un nouveau langage, portant
avec lui de nouvelles significations.
Puis-je
le faire sans passer par une vison du monde liée à mes propres
désirs ?
Ce
langage peut-il être simplement pure abstraction ?
Pour
qu'il parle à tous à quoi doit-il être relié ?
______________________________________________________________________________________________________
MARDI
29.JUILLET
Temps
froid et grisâtre sur la Bretagne. D… et K…n'arrêtent
pas de se disputer; il est toujours difficile dans un couple de
décider de l'un ou de l'autre qui des deux à le plus tord. D..
n'est pas facile à vivre, il se laisse souvent aveugler par son
idéalisme, K…est aussi idéaliste; mais elle est aussi plus
terre à terre; toutefois elle se laisse avoir par le côté
affectif , car elle est plus fragile en apparence de ce côté. Je
retrouve ici les mêmes antagonisme de couple que partout ailleurs
sous des formes différentes à première vue ; mais au final les
luttes passionnelles sont souvent les mêmes.
P..
LE 9 AOÛT.
Je
suis toujours en Bretagne ; D.... et K.. vont à un mariage cet
après midi, je vais en profiter pour rester seul.
Depuis
plusieurs semaines, nous avons pris l'habitude de fonctionner à
trois. Notre périple sur le festival en est à son milieu. Après le
cycle avec les ateliers d'enfants, une certaine saturation est
apparue. Heureusement le travail de collage d'affiches que nous
effectuons D.. et moi nous procure un certain dépaysement. J'admire
mon ami, c'est un brasseur d'énergies.
Le
prochain point d’intérêt à venir, c'est le BREAD AND PUPPET.
J'ai
du mal de prendre des notes d'une façon régulière ; personne
d'ailleurs ne m'oblige à le faire ; à part cette hantise de la
chronique qui m'est toute personnelle.
Il
se révèle qu'en réalité, j'ai peu de chose à dire ; et bien peu
de choses à noter ; cela dure depuis pas mal d'années. Ces notes
n'ont peut-être qu'un seul usage ; elles constituent des jalons ;
j'ai toujours eu la certitude que j'écrirais un jour un roman(le
roman de ma vie)comme je manque de recul et de distance par rapport
aux événements vécus, je me contente de ces notes prises à la
hâte en espérant qu'un jour elles puissent me servir.
Je
manque trop de recul et de distance pour écrire vraiment comme un
chroniqueur.
A
partir de quel moment serais-je vraiment en situation d'écrire
pleinement ? On ne peu pas passer toute sa vie à mettre sa vie en
événement par le biais de notes presque illisibles.
Je
ne suis pas mûr pour écrire comme je l'entends ; mon art de vivre
n'est pas encore au point ; j'ai trop de ratés, je suis trop
chaotique, trop brouillon, trop anxieux, trop convaincu d'être un
artiste.
Je
voyage trop dans les rêves, pas assez dans la réalité.
Je
n'ai pas encore appris à accepter ma spontanéité créatrice, comme
un don venant de la nature ; je suis encore pris dans un tourment
intérieur que j'ai du mal à m'expliquer.
SAMEDI
16 AOÛT
Toujours
la Bretagne. Bientôt le stage du Bread.
Les
événements courent et accourent.
Je
demeure insatisfait de ma vie présente. Les actions que je mène me
laissent sur ma faim.
Je
dois rejoindre la peinture d'ici peu.
SANS
DATE
Arrivée
du Bread and Puppet dimanche vers 16H.
L
e rythme des événements se précipite depuis l'arrivée de la
troupe.
Me
suis branché avec une fille aux yeux bleus transparents au visage
volontaire G.. c'est une ex parisienne qui a rejoins la compagnie de
P.S… Il y a aussi d'autres rencontres intéressantes M… et
N...et une multitude d'autres personnes avec qui les branchements
sont plus fugitifs.
P.S…
nous a expliqué le programme des jours qui suivent. Répétition de
la scène du pain demain (sans les marionnettes ; elles ne sont pas
arrivées).
P..
et le reste de la troupe décident( après le repas) d'aller visiter
les calvaires. P.. garde son calme et sa bonhomie devant les
événements; Il me fait penser à un lutin espiègle, très malin.
Il tente d'apaiser les ardeurs des stagiaires. Il nous a expliqué la
méthode pour confectionner les masques.
J'ai
décidé de visiter les calvaires avec la troupe ; nous avons visité
deux endroits, une chapelle bretonne du XIVème siècle, avec une
cloche curieusement penchée, et à l'intérieur des fresques d'une
beauté saisissante ; même si la mythologie chrétienne qui sert de
toile de fond paraît un peu usée. Nous avons visité une autre
chapelle située en bordure de mer, avec toujours des fresques
remarquables(des ex-voto).
SANS
DATE
Je
suis un fils de la femme, élevé initié par elle, je dois assumer
cette part de complicité (celle là qui fût délibérément
entretenue par ma mère) ; je dois aussi assumer la part de l'homme,
sa part de responsabilité, celle que j'ai du aller chercher
moi-même, car mon père ne m'avait pas initié à sa conquête.
J'ai
trop tendance à me laisser aller au plaisir et à la jouissance,
c'est là une part non négligeable de ma faiblesse.
SANS
DATE
-
L'homme ne peut être libre que s'il reconnaît la forme objective de
ses passions.-
J'ai
écris ça dans un moment de lucidité ou de démence ?
LE
9 NOVEMBRE 80
Je
ne sais plus quand j'ai pris ces notes plus haut ; il y a peut-être
de ça une semaine ou plus. Dans le cours sinueux de mes démarches,
je manque de plus en plus de points de repère.
NOTES
DE L'AUTEUR PRISENT A LA SUITE DU MANUSCRIT ( LORS DE SA FRAPPE en
l'an 2000).
SUITE
Quelques
notes tirées d'un cahier vert.
Notes
sur un projet. Création d'une base expérimentale de l'acteur.
Octobre 8O.
Notes
sur des actions rituelles.
Notes
sans dates
Puis
notes de novembre 8O.
RECONSTITUTION
CHRONOLOGIQUE
Je
dois tenter de restituer des événements d'époque.
TRANSAT
début 81.
2:J'ai
retrouvé le passage Sur la vision au châtelet de la DANSE SACRÉE.
Elle apparaît dans des notes datées de mai 8O. (en réalité je
suspecte cette séance d'avoir eut lieu en MAI 81,car toute la
période dramatique qui a suivit s'est située dans la foulée, les
cours de Baratta, Malavica, le mantra etc. d'autre part, ces notes
sont prises sur un cahier semblable au journal daté de mai 8I)
Aurélie
et Balzac ou les placer ?
Instants
et destin ?
Je
dois supprimer beaucoup de choses inutiles.
Je
me demande d'ailleurs quel est réellement l'intérêt du travail que
je m'obstine à mettre à jour, car il ne reste de celui que j'étais
hier qu'une pellicule incertaine.
ST.J.D'ASTRE
NOTES NON DATÉES(Sans doute prisent lors de la frappe du manuscrit
en 2000)
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